L'histoire de l'abbaye-prieuré

Une abbaye de moniales au VIIème siècle
Selon la tradition, une abbaye de moniales fut fondée à Tuffé par une dame noble nommée Loppa. Elle en devint la première abbesse. A cette abbaye de femmes, s’ajouta un monastère d’hommes chargés du temporel. Peu à peu, les religieux développèrent leur sujétion ; ainsi se créa le bourg de Tuffé, autour de l’abbaye à laquelle vint s’ajouter une église paroissiale.
Si, de cette époque, nous disposons de quelques sources écrites, il n’en est pas de même de l’époque suivante, les sources demeurent muettes jusqu’au XIème siècle. D’ailleurs, il est fort probable que la vie monastique fut abandonnée en raison des troubles du moment (incursions normandes) ; ce qui fut le cas dans la plupart des monastères du Haut-Maine.
Quoi qu’il en soit, le calme revenu, la vie monastique reprit ses droits sous l’égide du seigneur Hugues de Mondoubleau ; il était fréquent à cette époque que les fondations religieuses soient détenues par des laïcs qui en récupéraient les profits. Toutefois, à sa mort, en 1073, Hugues de Mondoubleau légua le monastère devenu exclusivement masculin, à l’abbaye Saint Vincent du Mans.
Le prieuré bénédictin
Dès lors, l’abbaye Notre Dame de Tuffé devint prieuré et le restera jusqu’à la Révolution. La donation fut particulièrement intéressante pour l’abbaye St Vincent car en plus des biens religieux, Hugues de Mondoubleau y ajouta le bourg de Tuffé, une partie de ceux de St-Hilaire et de la Chapelle St Rémy, ainsi que les terres avoisinantes.
Richement pourvus de terre, les moines bénédictins entreprirent la mise en valeur de leurs biens. En 1100, ils creusèrent le "grand étang" qui subsista au moins jusqu’à la Révolution (celui-ci était situé à peu près à l’extrémité nord de l’étang actuel) ; vers la même époque, ils défrichèrent et mirent en place un grand nombre d’exploitations agricoles dont la plupart existent toujours.
Mais, bientôt, avec le retour des difficultés – guerre de 100 ans, problèmes internes aux ordres bénédictins – les religieux durent concéder une partie de leurs terres à des seigneurs laïcs, notamment à celui de Chéronne.
Puis au XVIème siècle, la vie religieuse dut être restaurée et ce ne fut qu’avec la reprise en main par la congrégation de St Maur (1646) que le prieuré retrouva son lustre passé ; il connut même sa période la plus florissante. Cela permit aux moines de reconstruire l’ensemble des bâtiments conventuels, à l’exception de l’église abbatiale, de 1685 à 1740. De cette reconstruction datent les deux porches (celui situé sur la place et celui situé près du chevet de l’église), la galerie de cloître, dont il reste une partie importante acquise par la municipalité en 1985, ainsi que le logis prieural (acquis en 2003)
Ces vestiges qui présentent une réelle valeur patrimoniale, permettent de découvrir une architecture religieuse et une histoire monastique remarquables, léguées par les moines bénédictins de la congrégation de Saint Maur.
Au monastère, s’ajoutaient des bâtiments agricoles et des terres exploitées par les moines ; l’ensemble était ceint de murs et de tourelles qui n’étaient pas tant défensifs que symboliques.
D’ailleurs, à l’arrière du prieuré, il ne semble pas y avoir eu de murs, mais seulement un vaste marécage séparant les biens religieux de ceux du château de Chéronne.
Le pigeonnier ou fuye
A l’époque mauriste, les bâtiments à vocation économique qui complétaient comme il se doit le prieuré (une abbaye devait être composée de telle sorte que les moines puissent y vivre en autarcie) n’ont pas été reconstruits. Ainsi, le pigeonnier actuel remonte vraisemblablement au XVIème siècle, même si sa datation n’est pas évidente dans la mesure où ce type de bâtiment s’apparente à la construction rurale qui n’a que très peu évoluée entre le XVème et le XXème siècle.
Les pigeonniers ou fuyes faisaient l’objet d’un droit banal réservé aux seigneurs justiciers dont faisaient partie les moines du prieuré, seigneurs-barons de Tuffé.
Si les origines de ce pigeonnier sont anciennes, en revanche la superstructure a été remaniée après la Révolution puisque au moment de la vente des biens nationaux, le pigeonnier est mentionné dans un inventaire avec un toit conique semblable sans doute aux autres pigeonniers subsistant (Par exemple, celui de la Cour à St Hilaire).
Par contre, l’intérieur a été très peu modifié, la plupart des logettes demeurent intactes avec leur structure de terre cuite antérieure au XVIIème siècle. A ces trous de boulins, s’ajoutent sur les parois des rangées de briques qui avaient pour but d’empêcher aux rongeurs de gravir les murs et de détruire les couvées. Seule manque la pièce de bois centrale autour de laquelle gravitait une échelle permettant de ramasser les œufs dans les nids.
La fin du prieuré
Le prieuré fut occupé par les moines jusqu’en 1768, puis les moines ne vinrent plus à Tuffé qu’occasionnellement jusqu’à ce que le prieuré soit vendu en tant que bien national en 1792.
A leur départ, reculant devant le coût des réparations, les moines firent détruire l’abbatiale qui menaçait ruine.
Après la Révolution, le prieuré fut transformé en faïencerie
Un inventaire lors du décès de Jean Galmard en 1812 atteste de l’importance de la fabrication: elle ne comportait pas moins de 6 tours de potier, un moulin à broyer les émaux (dans le pigeonnier) et plusieurs dizaines de milliers de pièces étaient entreposées en attente de cuisson.
En 1873, le corps de bâtiment le plus important fut à son tour démoli, de telle sorte qu’il ne resta plus qu’une partie du cloître, transformé en logis d’exploitation agricole, et un pavillon utilisé en résidence secondaire, jusqu’à l’acqui­sition par la commune de Tuffé.
La restauration.

Après avoir restitué au pigeonnier son élévation et le toit conique attestés par les gravures du 18ème siècle, (2004-2006), la commune a engagé les travaux de mise hors d’eau du « pavillon ». Le ravalement des façades et l’étude archéologique qui l’a accompagné ont permis de retrouver les étapes de l’évolution du bâti : les éléments les plus anciens remontant au XIIIème siècle. Toutefois, la mise en relation entre les différentes sources iconographiques, les textes et l’existant pose encore des énigmes, notamment sur la fonction des salles du pavillon subsistant, et, plus troublante encore, l’implantation exacte de l’abbatiale.
L’ affectation actuelle
En 2004, une association s’est constituée pour mettre en valeur et animer le site..
Outre un travail de recherches historiques, elle œuvre pour donner aux lieux une fonction culturelle, avec l'aide financière de la Commune et du Conseil Départemental de la Sarthe. Elle travaille à mettre en valeur le parc pour en faire à terme un des beaux jardins de la région.
Depuis 2017, elle accueille également un point d'information touristique de la Communauté de Communes de l'Huisne Sarthoise.


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